2024
La Résistance à Gonesse
Dans son rapport en juin 1950, PASTOR écrit que la population du secteur a été généralement sans réaction à l’égard de l’occupant en 1940. Qu’il existait une importante adhésion ouvrière à l’embauche dans les chantiers allemands et les entreprises au service de l’ennemi, en raison des salaires élevés. Le commerce de détail, bénéficiaire de la présence des troupes, manifeste une apathie peu favorable à la Résistance. Le gouvernement de Vichy bénéficie d’un préjugé favorable dans les milieux modérés qui se voient attribuer des fonctions officielles et politiques qu’ils avaient perdus en 1935. La Résistance n’est le fait, en 1940 et 1941, que de quelques personnalités qui trouvent peu d’échos en raison du climat général.
Les premiers éléments de Résistance s’agrégèrent cependant en 1941 autour de FOURNET, Directeur d’école à Garges, DEBONNET, Directeur d’école à Goussainville, tous deux officiers de réserve, MIGNON, employé à Arnouville et BOUTHORS, adjudant de gendarmerie de Gonesse, mis en retraite anticipé. Un premier contact est pris à cette époque avec le réseau O.C.M. (Organisation Civile et Militaire).
En 1943, les nouvelles mesures pour la relève et le service du travail obligatoire provoquent la formation de nouveau groupe de Résistants et la prolifération des précédents. Des formations ayant des affinités avec les réseaux Libération Nord, Front National et Francs Tireurs et Partisans, naissent à Gonesse.
Une formation F.T.P. (Francs Tireurs Partisans) du secteur, connue sous le nom de " Victor Hugo ", après avoir commis une série de coups de main dans les communes du secteur est activement recherchée par la police de Vichy. Elle finie par disparaître, suite à de nombreuses arrestations, en septembre 1943.
Un groupe dénommé Gonesse a été créé en juin 1944 sous le commandement du commandant Raymond RAMBERT.
1940 : Actions individuelles de sabotages des télécommunications allemandes.
1943 : Le groupe F.T.P. Victor Hugo exécute une série de coups de main dans la région, en particulier sur le poste de radioguidage de Roissy-en-France et sur l’armement des gardes-voies à Goussainville.
15 juillet 1943 : Exécution du commissaire de police de Gonesse Franck Martineau.
Des individualités de Gonesse et de Garges ont également participé à des enlèvements à Aubervilliers et Versailles. Une partie des produits de ces opérations a été mise, pour une faible fraction, à la disposition de l’organisation des F.F.I. (Forces françaises de l'intérieur) lors de la Libération. Le groupe de Villiers-le-Bel a participé, en juillet 1944, à l’enlèvement des armes en gare d’Argenteuil, armes dont la livraison a été faite à Paris pour l’armement de la Préfecture de police.
A partir du débarquement, des équipes spécialisées ont systématiquement détruit ou détérioré les poteaux indicateurs ou les bornes et ont répandu une grande quantité de pointes crèves pneus sur les routes.
Plusieurs opérations de sabotage nocturne ont été réalisées sur le terrain même de l’aéroport du Bourget, avec des taux de réussite divers. Plusieurs avions ont été endommagés en juin et juillet 1944, dans les hangars de Bonneuil-en-France. La lutte contre le S.T.O. a eu pour centre la mairie de Garges, avec le concours du Secrétaire de Mairie BRUYAS, dès 1943 et avec la complicité de l’adjoint au Maire à partir de septembre 1943. Ce centre a fourni de très importants contingents de fausses identités et de cartes d’alimentation, tant dans la région, qu’au secteur de Versailles, aux organisations du 10e arrondissement de Paris, et à plusieurs personnalités Résistantes. Des complicités utiles étaient assurées dans les services de la Préfecture de Versailles.
L’assistance aux pilotes alliés a été assurée dans toutes les communes du secteur, par les différents groupes.
Quelques figures de la Résistance gonessienne

Jean Désiré Albert CAMUS
Résistant Gonessien. Fusillé par les Allemands au Mont Valérien le 25 avril 1944.
Né le 26/03/1926 à Gonesse (14 rue du Vieux Marché), fils de Marceau Octave et d'Hélène Joséphine REMY, Domicilié 70 rue Galande chez ses parents.
Il est manœuvre chez Durand Raucher à Gonesse en 1939 puis Levy singer à Dugny en 1942.
Requis au STO pour une entreprise allemande aux Sables d'Olonne jusqu'en juin 1943, il ne veut pas partir en Allemagne. Il contacte LORGNET, un camarade et entre comme FTP sous le matricule 2120 dans le Groupe Victor Hugo dirigé par "Charles ". Il est responsable de plusieurs attentats contre les forces d’occupation et des collaborationnistes : Le 21/07/1943, actions à Villiers le Bel, un attentat rue Guénégaud à Paris puis le 24/07/1943 rue Esquirol ; le 15/07 il participe à l’action ayant conduit au décès du Commissaire Franck Martineau à Gonesse; le 30/07 à Belleville... Il manque d’être arrêté le 31/08/1943 aux environs de Gonesse vers Roissy ; le 23/10/1943 il réalise un attentat à la Mairie de Nogent sur Marne. Il est appréhendé le 08/01/1944 rue de Vaugirard par les inspecteurs de la BS2. Il passe au Tribunal du Gross Paris le 11/04/1944 / Il est emprisonné à Fresnes puis fusillé au Mont Valérien le 25/04/1944. Son décès est transcrit le 26/04/1945 sur les registres d’état civil. Il est inhumé au cimetière de Gonesse. Période de service homologué du 01/05/1942 au 08/01/1944/ FTPF Secteur Gonesse. Il est inscrit "Mort pour la France" le 02/05/1946.


Tombe de Jean CAMUS au cimetière de Gonesse etphotographie de Jean CAMUS dans la circulaire de recherches le concernant (circ. 15/10/43)
Crédits : © Archives et Patrimoine de Gonesse (2024)

Copie des lettres écrites par Jean Camus à ses parents avant son exécution au Mont Valérien le 11 avril 1944
Crédits : © Archives et Patrimoine de Gonesse (2024)

Pierre Fernand Ernest Paul LORGNET
Résistant Gonessien. Fusillé par les Allemands au Mont Valérien le 10 mars 1944.
Né le 19/07/1921 à Crépy en Valois (Oise)
Fils de Fernand Ernest Virgile (+ 19/05/1931) et Andrée Aglaé Paula DHELLIER, (ép CANONNE Emile en seconde noce) domicilié 4 bis rue de Villepinte
Il est chauffeur livreur pour la maison Catujo à Paris.
Classe 1941, Réfractaire au STO, il réalise des actes de Résistance dès 1942, fin juin 1943 il contacte Jean KENTZENGER rencontre Emile REAUBOURG, André JOUANNEAU et Jean CAMUS et entre dans le groupe Victor Hugo, "GS" sous le matricule 2122. Résistant FTP (Franc-Tireur Partisan) et partisan ses alias sont "BENOIT" ou "CANONNE" ; mi-juillet 1943 il participe à l'incendie d'un hangar à Gonesse, le 20/07 il rate un attentat, il participe à l'action contre Franck MARTINEAU à Gonesse le 15/07/1943. Le 31/08 il est arrêté à proximité de Gonesse à Roissy après l’attentat. Il est hospitalisé à La Pitié Salpêtrière car il a essayé de se suicider lors de son arrestation. Il est interrogé par les SS. Il passe au tribunal du Gross Paris le 29/02/1944. Incarcéré à Fresnes, il est fusillé au Mont Valérien le 10/05/1944. Il est d’abord enterré à Ivry puis ré inhumé à Gonesse. Le jugement est transcrit sur l’état civil de Gonesse le 29/06/1944. Il est inscrit "Mort pour la France" le 06/12/1947. Il obtient à titre posthume la médaille de la Résistance.
Période homologuée du 30/08/1943 au 10/03/1944 - Groupe FTPF Victor Hugo sous la direction du colonel " Gilles " dit Eistein.


Tombe de Pierre LORGNET au cimetière de Gonesse et certificat de validation des services rendus en tant que Résistant datant de 1954
Crédits : © Archives et Patrimoine de Gonesse (2024)

Copie des lettres écrites par Pierre Lorgnet à ses parents avant son exécution au Mont Valérien le 11 avril 1944
Crédits : © Archives et Patrimoine de Gonesse (2024)

Photographie de Louis FURMANEK dans la circulaire de recherches le concernant (circ. 15/10/43)
Crédits : © Archives et Patrimoine de Gonesse (2024)
Louis FURMANEK
Résistant Gonessien. Fusillé par les Allemands au Mont Valérien le 10 mars 1944.
Né le 09/06/1926 à Bogeuin (Pologne),il dit qu'il est né en 1920 pour s'engager.
Manœuvre dans une usine de choucroute et garde voie.
Il est le fils de Franciszek (François) et de Rosalia KALINSKA (+ 05/03/1944).
Il est domicilié 33 rue Galande.
Il aurait rejoint les FTP en juin 1943 dans le groupe Victor Hugo, membre du détachement MARCEAU. Il a le grade de sergent, son alias est "GERARD" dans le Groupe d'Aulnay-sous-bois (93). Il participe à plusieurs activités de sabotage sur les voies ferrées. Il fait partie de la résistance polonaise FTPF lié à la résistance française FFI / Franc-Tireur. Il est blessé lors de l'attaque du Dr Guérin à Paris 7e le 27/09/1943 il est hospitalisé à La Pitié puis incarcéré à Fresnes. Il comparait au Tribunal du Gross Paris le 29/02/1944. Incarcéré à Fresnes il est fusillé au Mont Valérien le 10/03/1944. D’abord enterré à Ivry, il est ré-inhumé à Gonesse. Son décès est retranscrit sur les registres d’Etat civil de Gonesse le 30/12/1944. Il obtient à titre posthume la médaille de l'ordre de la Libération. Déporté et interné il est inscrit "Mort pour la France" le 10/06/1948.
Période d’homologation des services du 27/09/1943 au 10/03/1944.
Son frère Joseph est lui aussi Résistant avec pour période de services homologués : 01/06 au 13/09/1943 - FFI Gonesse - il habite Gonesse aussi au 33 rue Galande. Celui-ci dira de son frère qu'il a menti sur son âge pour participer au conflit.

" J’avais 16 ans en 1940. Je suis rentré dans la Résistance grâce à CAMUS, j’étais agent de liaison. En fait, nous ne connaissions pas les autres Résistants. J’ai été emprisonné pendant 6 mois à Fresnes, où j’ai été interrogé à plusieurs reprises par la Gestapo. Ils cherchaient à connaitre les ramifications de la Résistance. Mais nous ne pouvions pas savoir, nous ne pouvions pas donner de noms puisque nous ne les connaissions pas. À part, FURMANEK et CAMUS, les autres je ne les connaissais pas. Le mieux c’était de ne rien dire, si vous disiez un mot c’était fini. "
" Le 29 février 1944, nous sommes passés devant le tribunal allemand. Nous étions 9 prévenus dont CAMUS, FURMANEK, LORGNET, DROUHOT et moi-même. C’était un semblant de procès, qui a duré une heure. Louis FURMANEK, je lui dois la vie. Il a affirmé devant le tribunal que je ne savais rien. J’ai été condamné à la réclusion et lui à la mort ; Il avait 16 ans et demi. A la suite de cela nous sommes rentrés dans nos cellules. Le 10 mars ma mère a eu une permission pour venir me voir avec ma sœur en prison. Elle m’a dit « J’ai vu LORGNET et DROUHOT qui partaient enchainés ». C’était le 10 mars vers 15h, à ce moment-là j’ai compris que c’était fini pour eux. A la tombée de la nuit ils ont été fusillés. Le 17 mars j’ai été déporté en Allemagne ".
Raymond
DEVILLECHAISE


Tombe provisoire de Louis FURMANEK à Ivry juste après son exécution et sa tombe définitive au cimetière de Gonesse
Crédits : © Archives et Patrimoine de Gonesse (2024)

Milda Marthe Albertine MOGET
Née le 26/01/1915 à Saint-Sulpice-sur-Risle (61).
Fille de Louis Jules Alfred et Marguerite Marthe BICHER, domicilié en 1936, 66 avenue Denis Papin Garges ; puis en 1938 à la Perception de Gonesse, place du marché (du 8 mai 1945 aujourd’hui) puis à Paris 19e en 1946 (+ à St Lô - 50 30/09/1981).
Période de services homologués 15/08 au 04/09/1944 - Groupe de Gonesse OCM/ Homologuée FFI / OCM. Principales fonctions dans la Résistance : propagande anti allemande, recrutement, diffusion de journaux et de tracts, transmission de renseignements, fourniture de ravitaillement aux aviateurs américains et aux réfractaires, recherche des Résistants et réfractaires non organisés ayant besoin de faux papiers.
Avec ses parents, elle a caché, avec l’aide de son oncle (Monsieur André RICHER) l’abbé Paul LOUIS vicaire de la paroisse Saint-Vincent de Paul à Clichy (Seine) dont la tête était mise à prix par les Allemands, du 3 février au 14 avril 1944. Elle a également caché l’abbé HENARD, curé de Garges les Gonesse en août 1944.

Marie Louise RAUSA (épouse THEL)
Née le 25/04/1920 à Villeneuve sur Lot ; Espagnole, naturalisée Française en 1931.
Fille de Manuel (Résistant FFI aussi, Espagnol) et Ascencion LORAS, épouse THEL Julien (+ à Villeneuve sur Lot le 13/10/1974).
Période de services homologués : 15/08 au 04/09/1944 - FFI Gonesse / Homologuée FFI Libération Nord.
Elle exerce le métier de Sténo dactylo et est domiciliée 24 rue des écoles à Arnouville
Principales fonctions dans la Résistance : distribution de tracts et de journaux clandestins. Aide aux sinistrés sous les bombardements alliés de Bonneuil du 14 juin 1944 et pendant les jours de la Libération du 26 au 30 août 1944 sur les communes avoisinantes.
Un aviateur américain atterrit à Gonesse
le 14 juillet 1943, un bombardier est abattu par la DCA allemande mais le lieutenant Richard MANNING saute en parachute et tombe à Gonesse au milieu des champs. Il est blessé à la jambe et conduit à l’hôpital par les Gonessiens. Il est soigné par le docteur CARDOT. Le Maire Félix FAGLIN va alors rendre visite au blessé. Lorsque les autorités l’apprennent, il est alors révoqué suite à un courrier du Felkommandant en date du 22 juillet 1943.
Témoignages
" Un avion américain a été touché et nous l’avons vu, un aviateur sauter en parachute. Mon père m’a dit : " On va l’attendre, celui-là, ils ne l’auront pas " . Je lui ai demandé ce qu’il allait encore faire. Mais quand nous sommes arrivés il était blessé, sinon mon père voulait l’aider à se sauver. Nous l’avons détaché du parachute, nous l’avons libéré mais il n’a pu se relever. C’était Impossible, il avait la jambe cassée. Nous sommes rentrés tout de suite chez nous. Il a été emmené ensuite à l’hôpital, nous ne pouvions pas faire autrement ".

Paulette WAROQUIER


La forteresse volante dans laquelle se trouvait l' Américain, ayant fini son parcours sur la voie ferrée à Louvres
Crédits : © INA, droits réservés

" Ce 14 juillet 1943, une formation de bombardiers lourds accompagnés d’un chapelet d’obus éclatant tout autour des appareils survolent à haute altitude la plaine de Gonesse. Soudain un appareil, touché de plein fouet, lâche un nuage de fumée et quitte la formation en amorçant une descente mortelle. Maintenant les avions ont disparu, on entend encore les tirs d’artillerie dans le lointain, il ne reste qu’un point noir presque imperceptible, qui grossit lentement : Un parachute ! crient les gens afférés dans les champs. Le voici à terre entouré des Gonessiens. On a bien vite replié le parachute, caché le révolver et le poignard de l’homme. Les Allemands arrivent et décident de l’emmener à l’hôpital de Gonesse dans un tombereau emprunté à la ferme FREMIN, encadré par 2 soldats armés. Ils sont vite débordés par la foule qui grossit. Arrivé à l’hôpital c’est le docteur SOULIER qui se charge de son opération. L’aviateur subit un interrogatoire en règle par les officiers SS. C’est Mme VAUTHERIN, l’institutrice, qui s’occupe de la traduction en français et l’abbé ACKERMAN le vicaire- suisse d’origine, qui transmet les réponses en Allemand. L’Américain se retrouve seul avec l’abbé à qui il remet des papiers et un courrier à ses parents. C’est ensuite Mme VAUTHERIN qui la remettra à Mme CARDOT, la femme du docteur, pour qu’elle le poste. "
André BERNARD